Ma première réalisation : « Quand j’étais une réalisatrice en herbe (et que personne ne me l’a dit) »
Aujourd’hui, produire, écrier et réaliser, c’est mon quotidien. Pourtant, pendant des années, j’ai cru que c’était juste un hobby, un truc de « petite Noire de cité qui s’amuse comme elle peut ».
Spoiler : j’avais tort. Et si je vous racontais comment tout à commencé ?
Avec un clip de rap, une prof raciste, et une cassette mystérieusement disparue…
« T’es noire, je ne vais pas te donner de points bonus »
Ma première réalisation ? Un clip de rap. Au lycée. Pour mon projet de fin d’année, j’avais conçu un jeu de société sur l’histoire du rap (oui, déjà la culture geek-audiovisuelle). Problème : dans mon groupe, j’étais seule à quasiment tout faire. Classique. J’ai même écrit les paroles de la chanson promo (bonjour le flow de lycéenne motivée).
Mon frère m’a dégoté une caméra (merci le lycée voisin), et on a tourné entre studio de musique de la ville, rues de nuit, et rollers (parce que le style, ça ne se discute pas). Résultat ? la prof m’a collé un 10 au lieu d’un 12 (note donnée à mes « camarades »), avec cette petite phrase : « T’es noire, je n’allais pas donner des points bonus au bac… ». (j’ai eu la même remarque quand j’ai passé l’option danse aussi…).
Réaction de mes potes ? Silence radio et un petit regard à peine désolé. Ah, l’amitié…
Mais peu importe, j’avais kiffé créer ce projet. Le jeu de société, la chanson, le clip…
Dommage que la cassette ait « disparu ». (si quelqu’un la retrouvée, je paie une tournée !)

« Tu es trop pauvre, tu ne feras rien de ta vie »
Le pire dans cette histoire ? Personne ne m’a dit que c’était un vrai métier. Pas mes potes, pas ma famille, et surtout pas le conseiller d’orientation du lycée qui m’a ressorti la rengaine que j’ai entendue toute ma jeunesse : « Tu es trop pauvre, tu ne pourras rien faire ».
Dans ma tête, c’était plié :
>Noire ? ✅
>Pas riche ? ✅
>Femme ? ✅
Apparemment, la combinaison parfaite pour « ne rien réussir ».
Du coup, je me suis inscrite en AES (au hasard, comme on choisit une pizza sans gluten quand on a faim). Pendant ce temps-là, je continuais à créer : des vêtements, des histoires, des chorégraphies… Mais jamais au grand jour. Parce que dans ma famille, on me rappelait gentiment (tous les jours) que j’étais « idiote, moche, trop grosse, et de toute façon pas faite pour le bonheur ».
Et pourtant, je créais !
Le pire du pire ? Chaque fois que j’osais rêver, quelqu’un s’arrangeait pour tout casser :
La famille, championne olympique du sabotage « Tu veux devenir prof de danse ? Tiens, redouble ta 3ème, comme ça l’année prochaine tu seras trop vieille pour t’inscrire. » (Au moins, j’ai eu le temps de peaufiner mon moonwalk…)
Des membres proches, CEO du « T’es nulle en tout… sauf en lessive ! » :
« Ton business ? Une blague. Mais hey, mère au foyer, c’est un vrai métier ! » (Sous-entendu : « Et encore, même là, tu vas galérer. »)
Mes « amis » spécialistes du « Je te soutiens… enfin, jusqu’à ce que tu aies besoin de moi évidemment » → Gold medal du ghosting.
Spoiler : Aujourd’hui, je produis, je réalise, et je danse quand je veux devant ma machine à laver. Et devinez quoi ? La blague, c’est eux.
La morale de l’histoire ?
Aujourd’hui, à plus de 40 ans, je réalise (sans jeu de mots) à quel point j’ai toujours été une créatrice. Même quand on me disait le contraire. Même quand on m’a refusé des points au bac parce que j’étais « trop noire ».
